POLITIQUE – La casse internationale. La visite d’État du roi Charles III en France, prévue à partir du dimanche 26 mars est « reportée », selon le vocable de l’Élysée, sur fond de tensions croissantes dans la contestation contre la réforme des retraites. Le monarque britannique devait notamment se rendre à Bordeaux, où la porte de l’hôtel de ville a été incendiée ce jeudi soir.
La décision a été « prise par les gouvernements français et britannique, après un échange téléphonique entre le président de la République et le Roi », a indiqué le palais présidentiel ce vendredi 24 mars, au lendemain d’un 9e round de manifestations – marqué par une très forte mobilisation et la multiplication des violences dans les cortèges – et à quatre jours d’une nouvelle journée d’actions dans les rues.
Un coup de théâtre diplomatique, sérieux camouflet pour le président de la République, vécu comme une victoire par certains opposants à la réforme des retraites. Depuis plusieurs jours, la visite fastueuse du roi et le dîner d’État prévu au château de Versailles suscitaient les interrogations ou les critiques de plusieurs élus de gauche. Ils voient désormais ce report – un fait rarissime – comme un motif d’espoir pour le retrait de la réforme des retraites.
« Charles III a reculé, Macron reculera »
« Il n’y a pas de petite victoire : la monarchie vacille », a par exemple réagi la députée LFI Clémentine Autain sur les réseaux sociaux, quelques secondes après l’annonce de ce report forcé, tandis que Jean-Luc Mélenchon ironise sur « la réunion des rois à Versailles dispersée par la censure populaire », un terme qu’il a déjà employé depuis les rejets des motions de censures pour motiver les troupes dans la fronde contre la réforme des retraites.
« Le report de la visite de Charles III, c’est en fait la monarchie présidentielle française qui est dépassée par les événements », veut croire de son côté Aurélien Saintoul, le député LFI des Hauts-de-Seine, en estimant que « de recul en recul », les opposants obtiendront « le retrait » du projet phare d’Emmanuel Macron. « Charles III a reculé, Macron reculera », ajoute Manuel Bompard, toujours sur les réseaux sociaux parmi cette ribambelle de réactions.
Mêmes espoirs teintés d’ironie du côté des communistes, socialistes ou écolos. Le député PS Jérôme Guedj, qui avait qualifié de « symbole délétère », jeudi sur franceinfo, cette visite d’État, à l’heure où « un monarque républicain ne tient pas compte du débat parlementaire et d’un peuple qui s’exprime », se réjouit de la tournure des choses. « Hier on demandait le report de la visite de Charles III. Maintenant on veut bien le communiqué pour annoncer le retrait de la réforme… », écrit-il désormais sur Twitter.
Pour Sandrine Rousseau, la venue du roi était « lunaire en plein conflit social d’une ampleur historique. » « Aller manger à Versailles… rien n’allait », a expliqué la députée écologiste sur BFMTV, ce vendredi en fin de matinée, saluant la décision de la reporter.
Dans ce concert de satisfaction, une réaction à gauche se veut plus grave. Celle de François Ruffin, lequel remarque que « Charles III a eu Macron au téléphone. Pas l’intersyndicale. Charles III a obtenu de Macron “un report”. Pas l’intersyndicale. » Selon le député insoumis de la Somme, « le pouvoir écoute les rois étrangers. Pas les travailleurs français. » De quoi inspirer les slogans des nouvelles pancartes pour la prochaine journée de mobilisation contre la réforme des retraites ?