Le site Henri-Moissan accueille depuis la rentrée 3 300 étudiants et 1 000 enseignants-chercheurs. C’est l’un des projets les plus importants de l’opération d’intérêt national visant, depuis 2010, à rassembler sur le plateau de Saclay 15 % de la recherche nationale.
« Le site Henri-Moissan est l’un des 20 campus de l’université Paris-Saclay, et pas l’un des moindres. » Le 18 avril, Estelle Iacona, la présidente de l’université Paris-Saclay a inauguré ce pôle de biologie, pharmacie et chimie. Depuis la rentrée, ce regroupement de bâtiments de 74 000 m2 implantés à Orsay, accueille 3 300 étudiants et 1 000 enseignants-chercheurs. C’est l’un des projets les plus importants de l’opération d’intérêt national menée sur le plateau de Saclay, qui vise depuis 2010 à rassembler plus de 15 % de la recherche nationale sur ce territoire à cheval entre Palaiseau, Orsay et Gif-sur-Yvette.
Ce lieu désormais unique regroupe des structures jusqu’ici dispersées : la faculté de pharmacie auparavant installée à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine) et l’institut de chimie moléculaire et des matériaux d’Orsay. Le site porte le nom d’un pharmacien chimiste français, spécialiste des corps à hautes températures et récipiendaire du prix Nobel de chimie en 1906.
Des amphis, des laboratoires de pointe et même un musée
Il a été conçu par l’architecte Bernard Tschumi, qui a conçu le siège de l’Organisation mondiale du commerce à Genève, plusieurs Zéniths en France ou encore la cité musicale de l’île Séguin à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). On y trouve des amphithéâtres, des salles d’enseignement et de travaux pratiques, et des laboratoires de pointe comme celui qui identifie les mécanismes physiologiques et pathologiques de maladies cardiaques ou l’UFR de spectrométrie et microscopie, l’une des plus importantes structures de recherche en chimie de France. Ainsi qu’un incroyable musée de l’histoire de la pharmacie, ouvert au public le vendredi pour le moment.
Gladys, Yannis et Arthur, trois étudiants de première année, apprécie le site même si « on a l’impression qu’il est vide, on traverse des couloirs déserts. Et c’est dommage d’avoir construit sur des terres agricoles, de ne pas avoir laissé de végétalisation. On a aussi de gros soucis d’accès, il n’y a pas assez de logements sur le plateau. On est obligé d’être dans la vallée, et pour venir, les transports sont très compliqués. »
Les institutionnels sont plus dithyrambiques. « Ce pôle de biologie, pharmacie, chimie est un site majeur de la recherche mondiale », applaudit Bertrand Gaume, le préfet de l’Essonne. Pour Estelle Iacona, c’est aussi l’aboutissement d’un long projet. « Cela fait plus de 10 ans que le site Henri-Moissan a été pensé, rappelle la présidente de l’université Paris-Saclay. Il a vocation à jouer un rôle important pour faire face aux défis environnementaux et sociétaux de demain. Il doit aussi contribuer à développer une recherche plus forte. C’est l’un des plus importants chantiers universitaires, c’est une vitrine et un très bel environnement de travail pour les étudiants et les chercheurs. »
La ministre Sylvie Retailleau a renoncé à sa venue
Prévue sur le carton d’invitation, Sylvie Retailleau n’a finalement pas fait le déplacement. L’actuelle ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, avait pourtant procédé à la pose de la première pierre du site en septembre 2019, puisqu’elle était à l’époque la présidente de l’université Paris-Saclay. Mais selon nos informations, elle a annulé sa venue en raison de probables manifestations.
Qui ont bien eu lieu. Plusieurs dizaines de personnes de Saclay en lutte ont tenté de perturber la cérémonie mardi dernier. Ils ont d’abord réclamé le retrait de la réforme de la retraite et dénoncé la précarité des étudiants et personnels depuis l’intérieur du bâtiment principal, avant d’être conduites dehors. Le cortège a continué de scander, dans le calme, ses revendications devant le site pendant les discours officiels, regrettant de ne pas pouvoir s’adresser directement à la ministre.
« C’est mon principal regret : l’absence de ministre, déplore David Ros, le maire (PS) au micro. Je sais bien que la situation politique du moment les oblige à se mettre, si j’ose dire, en retrait, voire en retraite des cérémonies publiques. Mais je pense que c’est une erreur. D’abord, il faut toujours privilégier les rencontres, dialogue et écoute, même – et surtout – en période de tensions. »
L’élu a souligné l’importance du nouveau pôle : « Nous sommes tous convaincus que ce projet est un joyau de l’université. Les crises successives de Covid que nous avons vécues démontrent, s’il en était encore nécessaire, de l’importance vitale d’un tel projet. Il y a urgence à nous doter d’outils de recherche et de production biologiques et pharmaceutiques nationaux autonomes. La question qui aujourd’hui nous est posée est même celle de notre indépendance et souveraineté scientifique. C’est donc une fierté de voir naître et vivre ce pôle sur notre territoire, ici à Orsay. Et c’est forcément une fierté pour notre nation aussi. »