TotalEnergies a engrangé d’énormes bénéfices au deuxième trimestre, profitant à plein de la hausse des cours du pétrole et du gaz qui a suivi l’invasion de l’Ukraine par la Russie et relançant le débat sur la taxation des « superprofits ».
Le groupe français a plus que doublé son bénéfice net au deuxième trimestre, à 5,7 milliards de dollars, contre 2,2 milliards au même trimestre de 2021.
« Les effets de l’invasion de l’Ukraine par la Russie sur les marchés énergétiques se sont poursuivis au deuxième trimestre, les prix du pétrole dépassant les 110 dollars le baril en moyenne sur le trimestre », a commenté le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, cité dans un communiqué.
« Nous sommes clairement dans un environnement très positif et dynamique marqué par des cours élevés des matières premières. Cela pourrait continuer à moyen terme à notre avis », a-t-il affirmé lors d’une conférence destinées aux analystes financiers.
Cette flambée sur les marchés profite à l’ensemble du secteur pétrolier et gazier dans le monde. Le géant britannique Shell a ainsi publié jeudi un bénéfice net multiplié par cinq au deuxième trimestre, à 18 milliards de dollars.
Ces bénéfices massifs ont alimenté en France un débat sur l’opportunité de les taxer, comme l’Italie et l’Espagne l’ont fait. L’Assemblée nationale a toutefois rejeté de peu samedi l’idée d’une taxe sur les « superprofits » ou « bénéfices exceptionnels » des grandes multinationales -notamment pétrolières-, malgré les protestations de la gauche et de l’extrême droite.
A la place, TotalEnergies a annoncé une remise de 20 centimes d’euros par litre de carburant à la pompe entre septembre et novembre dans toutes ses stations-service, puis de 10 centimes par litre sur le reste de l’année. Cette remise s’ajoutera aux 30 centimes de ristourne financés par le budget de l’État.
– « Profiteurs de guerre » –
« Le gouvernement a refusé une taxation exceptionnelle des profits liés à la hausse de l’énergie », a regretté jeudi la députée PS Valérie Rabault, comparant les bénéfices de TotalEnergies « aux 500 millions octroyés pour la baisse du prix à la pompe ».
« Plus que jamais, la taxe sur les superprofits doit être mise en place », a réclamé le député LFI Manuel Bompard.
« Quand vous ferez le plein de votre voiture pour aller au travail ou partir en vacances, rappelez-vous que chaque centime servira à engraisser un actionnaire et que l’Etat n’a rien fait pour bloquer les prix. Une seule solution: taxer ces profiteurs de guerre! », a attaqué le communiste Fabien Roussel.
A l’inverse, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a défendu une ristourne « plus efficace qu’une taxe ». « La taxe, le temps qu’on la monte, on prélève et qu’ensuite on la répartisse pour les Français, on en parle dans un an. Là, dans les prochaines semaines, vous aurez 20 centimes par litre de moins à l’essence », a-t-il souligné.
Le groupe TotalEnergies, lui, met en valeur sa « politique de retour à l’actionnaire », avec une croissance du dividende de 5% et de nouveaux rachats d’actions au troisième trimestre, ce qui enrichira mécaniquement les actionnaires. « Près de 15 milliards de dollars » pourraient être versés aux actionnaires cette année, selon M. Pouyanné.
Des annonces toutefois insuffisantes pour les marchés qui attendaient plus. L’action TotalEnergies reculait d’un peu plus de 2% à la Bourse de Paris en milieu d’après-midi.
Biraj Borkhataria, analyste à RBC Capital Markets, a jugé les résultats « corrects, mais sans feu d’artifice ».
Le bénéfice du deuxième trimestre a été réalisé en dépit d’une nouvelle provision de 3,5 milliards de dollars liée à l’éventuel l’impact des sanctions internationales sur la valeur de la participation détenue dans le groupe russe Novatek.
Cela s’ajoute à une dépréciation de 4,1 milliards de dollars au premier trimestre concernant plusieurs actifs russes, dont la participation au projet Arctic LNG 2. L’activité du groupe en Russie, où TotalEnergies n’investit plus dans de nouveaux projets, reste essentiellement concentrée autour du gaz liquéfié venu de Yamal LNG.
Hors les éléments exceptionnels annoncés jeudi, le résultat net ajusté atteint 9,8 milliards de dollars au deuxième trimestre, contre 3,5 milliards un an plus tôt. Sur le premier semestre, les 18,8 milliards de bénéfice net ajusté représentent quasiment le triple de celui du premier semestre 2021.