Barrages filtrants, blocages de plates-formes logistiques, opérations escargot… Les chauffeurs, discrets lors des premières mobilisations contre la réforme des retraites, prévoient de mener des actions dès dimanche soir.
La « journée noire du 7 mars » ne se fera pas sans les routiers, jusque-là silencieux dans le mouvement social contre la réforme des retraites. « Les confédérations appellent à mettre la France à l’arrêt, nous allons prendre notre part », prévient Patrick Blaise, secrétaire général de la CFDT Route, leader du secteur. « Nous allons clairement durcir le ton pour faire plier le gouvernement », appuie Patrice Clos, son homologue chez FO Transports.
Pourtant, les organisations syndicales avancent en ordre dispersé. FO et Solidaires demandent à leurs troupes de débrayer dès dimanche soir, 22 heures, pour une « durée illimitée ». Tandis que la CGT, la CFDT, la CFTC et CFE-CGC focalisent leurs efforts sur un mouvement de 48 heures, les 7 et 8 mars, en accord avec la ligne édictée par les huit confédérations, à l’unisson contre le projet gouvernemental.
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Au-delà de l’arrêt du travail, les routiers vont mener de multiples actions sur l’ensemble du territoire, dès lundi matin. Les chauffeurs vont bloquer des plates-formes logistiques et des zones industrielles, notamment dans les Hauts-de-France et en région parisienne. « Cela peut avoir des conséquences sur l’approvisionnement de la grande distribution, souligne Patrick Blaise. Le paquet de pâtes, en rayon mardi matin, ne sera peut-être plus là jeudi… » Ils organiseront également des occupations de ronds points et des barrages filtrants, « un peu partout dans les départements, en particulier aux frontières », confie Fabrice Michaud, secrétaire général de la CGT Transports.
Des craintes sur le congé de fin d’activité
Des opérations escargot auront lieu aux abords de grandes métropoles, comme Bordeaux et Toulouse, et sur de grands axes. « En principe, nous n’avons pas le droit d’utiliser nos camions. Mais on met des voitures devant et on suit derrière. On sait faire ! » lance un responsable syndical. La CGT et la CFDT travaillent également « au blocage d’un péage », sans en dévoiler la localisation pour le moment. « Il y aura sans aucun doute de fortes répercussions sur le quotidien des Français, prévient Patrick Blaise de la CFDT Route. Mais l’opinion publique soutient largement le mouvement social ! »
Les chauffeurs n’avaient, jusque-là, pas pris part aux différentes mobilisations. Car pendant longtemps, ils ont pensé qu’ils passeraient entre les gouttes de la réforme des retraites qui prévoie notamment de repousser l’âge légal de départ. Dans le cadre de son projet, le gouvernement prévoit en effet le maintien du « congé de fin d’activité » (CFA). Ce dispositif, qui prend en compte la pénibilité du métier, permet aujourd’hui aux routiers de partir en retraite à 57 ans, s’ils justifient au moins vingt-six ans d’activité. « Or, l’âge de départ est décalé de deux ans, de 57 à 59 ans, comme tout le monde, insiste Fabrice Michaud, de la CGT Transports. Surtout, nous n’avons aucune garantie sur la pérennisation du CFA. »
Lors d’une réunion, la semaine dernière, entre l’État et les représentants des salariés, le gouvernement s’est engagé à investir 150 millions par an jusqu’en 2030 pour maintenir le dispositif. « Mais j’ai bien peur que ça ne suffise pas », souffle Patrice Clos de FO Transports. « Et on voit bien que tout peut évoluer, alerte Fabrice Michaud. Les sénateurs veulent par exemple accélérer la fin des régimes spéciaux. Qu’est-ce qui nous dit qu’ils ne s’attaqueront pas ensuite à la suppression du CFA ? »