Du disque de platine à 18 ans à la prison et l’affaire Amra : la descente aux enfers de Koba LaD

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Étoile montante du rap français à la fin des années 2010 et promis à une grande carrière, Koba LaD se retrouve désormais mêlé à l’évasion de Mohamed Amra. Il est déjà emprisonné pour homicide involontaire, en attente de son jugement.

Du bout de son bras gauche garni de bijoux, Koba LaD tient entre ses doigts un joint soigneusement roulé et fraîchement allumé. Dans sa main droite, il s’apprête à recevoir un disque d’or, le premier de sa carrière. Des bouilles juvéniles se rassemblent devant le hall de son bâtiment, dans le quartier du Parc aux Lièvres à Évry (Essonne). Le froid saisissant du mois de décembre n’empêche pas le tournage prévu. Pendant 3 minutes et 43 secondes, ils sont des dizaines à danser, boire et fumer pour célébrer le succès de leur ami, dans ce qui deviendra le clip du morceau « Orgueilleux ».

Cette joie et cette insouciance, tant perceptibles sur le visage d’un Koba LaD à peine majeur, paraissent aujourd’hui bien lointaines. Le rappeur, de son vrai nom Marcel Loutarila, vient d’être mis en examen dans le cadre de l’enquête sur l’évasion de Mohamed Amra. Il a été interpellé alors qu’il est déjà en détention provisoire : quatre mois après la mort de l’un de ses passagers dans un accident de voiture à Créteil (Val-de-Marne), il attend d’être jugé pour homicide involontaire aggravé.

Une voix singulière et une carrière qui explose

Tout avait pourtant commencé de la meilleure des manières pour Koba LaD. En 2017, il fait une entrée fracassante sur la planète rap avec la série de freestyle « Ténébreux », dont le premier volet cumule 55 millions de vues sur YouTube aujourd’hui. Du haut de ses 17 ans, il se démarque notamment par sa voix singulière, qui n’hésite pas à monter très haut dans les aiguës.

Son premier album studio, « VII », une référence au numéro de son bâtiment, est un grand succès commercial. Il est notamment porté par le tube « Train de Vie », qui ouvre à Koba LaD la porte des radios et des playlists en boîte de nuit. Le jeune rappeur n’a encore que 18 ans quand l’album est certifié disque d’or en décembre 2018 puis disque de platine en mars 2019.

Signé chez le label Def Jam, qui compte alors dans ses rangs de nombreuses pointures du rap français comme Kaaris, SCH ou Alonzo, Koba LaD poursuit son ascension fulgurante. Le 19 avril 2019, il sort « L’Affranchi », son deuxième album studio. Il collabore entre autres avec Ninho et Maes, deux pointures de la scène urbaine en France.

Son morceau « RR 9.1 », en featuring avec Niska, lui aussi originaire de l’Essonne, explose tous les compteurs. L’entrée de Koba LaD sur ce titre, avec la phrase « Qu’est-ce que c’est trop bon la vie d’artiste » et son énergie dont il a le secret lui font dépasser les frontières du rap. Le tube tourne pendant tout l’été qui suit. « RR 9.1 » est, avec 148 millions de vues sur YouTube, le plus gros succès de la carrière du rappeur à ce jour.

Ce morceau a pourtant failli ne jamais voir le jour. Ou du moins, dans une version différente, qui aurait sans doute stoppé net la percée éclair du rappeur. Début mars 2019, Koba LaD dévoile le freestyle R.R (pour Rolls Royce, NDLR), puis le retire rapidement des plateformes de streaming. Même s’il n’a jamais officiellement communiqué dessus, la raison se trouve, sans l’ombre d’un doute, dans les paroles du morceau. « Et maintenant, j’peux baiser la meuf que j’veux, sans demander son avis », clame le jeune Évryen lors de son premier couplet. Le titre disparaît de la toile avant que la polémique n’ait le temps d’enfler, bien que quelques internautes aient eu le temps de relever ce passage problématique et de le partager sur Twitter. Deux mois plus tard, « RR 9.1 » voit le jour, et Koba LaD ressort sa punchline… tout en la reformulant : « Et maintenant elles veulent toutes baiser avec moi, sans me demander mon avis ».

Après le Covid, le début des déboires

La première polémique est évitée de peu. Ce n’était qu’un avertissement. Sur le plan musical, Koba LaD suit sa route et sort l’album « Détail » fin 2020. Bien qu’il reste sur les mêmes standards en termes de ventes, il marque moins les esprits des auditeurs de rap français que ses deux prédécesseurs. En parallèle, ses premiers déboires judiciaires pointent le bout de leur nez. Le 20 novembre 2020, au volant d’une Porsche, le jeune artiste crée un accident de la route à Marseille (Bouches-du-Rhône) et prend la fuite. Il se rend finalement trois jours plus tard. Pour ces faits, Koba LaD a été condamné à trois mois de prison avec sursis et 140 heures de travaux d’intérêt général.

Un an plus tard, il doit se produire en showcase à Bruxelles. Un tweet posté par le rappeur en 2019, jugé insultant envers les femmes marocaines, refait soudainement surface. Des appels au boycott de l’artiste fleurissent sur les réseaux sociaux. Peu de temps avant le show, Koba LaD et son équipe sont pris à partie par un groupe de jeunes bruxellois. Une bagarre éclate, avant qu’elle ne soit stoppée par la police locale.

En novembre 2022, il est de nouveau impliqué dans une bagarre en boîte de nuit, cette fois-ci à Paris. Très alcoolisé, Koba LaD aurait notamment donné un coup de bouteille sur la tête d’un client. Ce soir-là, trois hommes et une femme ont été blessés après avoir été passés à tabac. Cette soirée, qui devait s’annoncer festive, lui coûte une condamnation à 24 mois de prison, dont 12 mois avec sursis probatoire pendant deux ans.

« Si tu bé-tom c’est que t’es con »

Il fait donc un tour à la prison de la Santé. Pendant sa détention, il partage, selon nos informations, la même cellule que Mohamed Amra. Il sort de détention à l’été 2023. Mais son sulfureux passé le rattrape bien vite. Il est accusé d’avoir tabassé Deuspi, son ancien manager, à qui il reprochait de lui avoir détourné de l’argent. Des accusations que l’ancien associé nie. Le tribunal va dans son sens et condamne Koba LaD à 15 mois de prison.

Sur le plan artistique, il tente de soigner son image. Fin 2023, et contre toute attente, il se rabiboche avec son éternel rival Zola, lui aussi originaire d’Évry. Les deux jeunes rappeurs sortent un album en commun, « Frères Ennemis », et tiennent un discours d’apaisement et de fraternité durant toute la durée de leur promotion. Sur le plan sentimental, il officialise sa relation avec la chanteuse Wejdene. En interview, Koba LaD paraît plus calme, plus sage, plus mature.

Tout va s’effondrer en septembre 2024. Une nuit, Koba LaD provoque un accident de la route à Créteil, qui coûte la vie à l’un des passagers de la voiture. Il est depuis placé en détention provisoire en attente de son jugement. C’est dans sa cellule que les policiers qui enquêtent sur l’évasion de Mohamed Amra sont venus le chercher, lundi, afin de le placer en garde à vue. Les enquêteurs le soupçonnent d’avoir été mis au courant du projet de l’évasion de « La Mouche » et s’interrogent sur un possible appui financier.


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Étoile montante du rap français à la fin des années 2010, Koba LaD a vu sa carrière musicale gâchée par ses déboires judiciaires. « Si tu bé-tom (tomber, qui signifie aller en prison en langage familier, NDLR) c’est que t’es con », clamait pourtant le jeune rappeur dans son freestyle « Ténébreux #1 », qui l’a propulsé sur le devant de la scène. Un proverbe, dont il est l’auteur, que le jeune artiste n’a de toute évidence pas su s’appliquer.

leParisien

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