Les deux adolescents jugés pour avoir frappé et jeté Alisha, 15 ans, dans la Seine, à Argenteuil, le 8 mars 2021, ont été reconnus coupable de meurtre sur mineur de 15 ans. Ils ont été condamnés tous les deux à 10 ans de réclusion criminelle. Le tribunal n‘a pas retenu la préméditation.
Les deux adolescents avaient jeté Alisha vivante dans la Seine après l’avoir frappée, il y a un an, à Argenteuil, sous le viaduc de l’A15. Tim et Julia, aujourd’hui âgés de 17 ans (les prénoms ont été changés), ont été condamnés ce jeudi soir à 10 ans de réclusion criminelle.
Après un long délibéré de six heures, le tribunal pour enfants de Pontoise qui statuait en matière criminelle, les a reconnus coupables de meurtre sur mineure de 15 ans, ne retenant pas la préméditation. Auparavant, l’accusation avait requis 18 ans de réclusion à leur encontre. Du fait de leur âge, ils encourraient un maximum de 20 années de réclusion criminelle.
Ce verdict mesuré a été accueilli par la colère rentrée des proches et les cris de Jenny, la mère d’Alisha, qui ont résonné longtemps dans la salle des pas perdus du palais de justice. « Ma fille a été tuée. Elle leur a dit d’arrêter ! Vous comprenez ? Ils l’ont quand même tuée. Ils l’ont jetée à l’eau. Je ne comprends pas la Justice. Je suis où ici ? Alisha ne va jamais revenir. Ce n’est pas possible… » Elle le répète plusieurs fois et ajoute, au sujet des jeunes condamnés, qu’« ils vont sortir dans dix ans… »
Selon la défense, « il y avait un guet-apens pour commettre des violences »
Me Frank Berton, qui défendait le jeune adolescent, Tim, a pour sa part salué la décision du tribunal. « C’est une décision courageuse, emplie de sagesse, de mesure et d’espoir. C’est le résultat de quatre jours d’audience qui ont permis d’appréhender des faits commis par des jeunes de 15 ans. » Concernant la préméditation que le tribunal n‘a pas retenue, il ajoute : « Il n’y avait aucun acte préparatoire pour tuer, il y avait un guet-apens pour commettre des violences. »Newsletter L’essentiel du 95Un tour de l’actualité du Val-d’Oise et de l’IDFS’inscrire à la newsletterToutes les newsletters
Si le tribunal a rejeté la préméditation, il a estimé que les deux jeunes « ne pouvaient ignorer l’état manifeste de la victime » et que les adolescents « ont eu pleinement conscience qu’ils donnaient la mort. » Le tribunal a prononcé par ailleurs leur maintien en détention et ordonné une mesure éducative judiciaire jusqu’à leurs 21 ans « afin de favoriser leur réinsertion ».
Depuis lundi, pendant quatre jours d’audience, le tribunal a tenté de comprendre comment ces deux adolescents de 15 ans à l’époque, dans un contexte de rivalité banale entre collégiens et de harcèlement, en sont arrivés à une telle extrémité, le 8 mars 2021.
Ce jour-là, Alisha 15 ans, est retrouvée dans la Seine, noyée, le visage couvert d’ecchymoses, après avoir été frappée sous le viaduc de l’A15, à Argenteuil. On y retrouvera une boucle d’oreille de la victime et beaucoup de sang. Alertés par la mère de Tim à qui les deux jeunes ont évoqué les faits qu’ils venaient de commettre, les policiers ont ensuite rapidement retrouvé les jeunes bourreaux d’Alisha.
De troublantes recherches sur Internet
L’instruction judiciaire a montré qu’Alisha et Tim étaient sortis ensemble pendant une semaine. Les élèves du lycée professionnel privé Cognacq-Jay avaient échangé des baisers. Mais depuis le début de l’année scolaire, ils se déchirent alors que Tim et Julia se sont mis en couple rapidement. Une relation fusionnelle, tumultueuse et toxique.
En février 2021, Tim diffuse des photos dénudées d’Alisha. Une bagarre éclate entre Julia et Alisha quelques jours plus tard. Peu avant le passage à l’acte, Tim fait de troublantes recherches sur Internet : « Meurtre sur mineur » ; « Meurtre sur mineur condamnation » ou encore « Quai de Seine Argenteuil »…
Début mars, Julia renoue avec Alisha, et les deux filles conviennent d’un rendez-vous pour discuter au bord de la Seine. Nous sommes le 8 mars. Tim, prévenu, arrive. Puis les coups. Alisha, encore consciente, est jetée dans la Seine. « On ne voulait pas laisser de preuves », a confié Tim aux enquêteurs.