Retraites : avant la décision du Conseil constitutionnel, quels sont les scénarios possibles ?

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Le pass sanitaire devant le Conseil constitutionnel Le Conseil constitutionnel rendra son verdict sur l'extension du pass sanitaire dans la journée du jeudi 5 août. Le Conseil constitutionnel, Aile Montpensier du Palais-Royal; 2 rue de Montpensier, 75001 Paris Le 05/08/2021 Photo : Delphine Goldsztejn

Les Sages vont rendre ce vendredi une décision sur les recours déposés au sujet de la réforme des retraites. Ils vont également se prononcer sur la conformité d’un référendum d’initiative partagée, réclamé par plus de 250 parlementaires.

De nombreux Français auront les yeux rivés sur le 2, rue de Montpensier, ce vendredi. C’est là que les Sages du Conseil constitutionnel vont se prononcer sur la conformité du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) rectificatif – qui contient la réforme des retraites – ainsi que sur la validité du référendum d’initiative populaire (RIP). Quatre scénarios sont possibles avec des conséquences différentes pour chacun. Le Parisien fait le point.

La validation totale

Dans ce cas, « c’est le président qui reprend la main », précise le professeur de droit public à Sciences-po, Guillaume Tusseau. Emmanuel Macron aura jusqu’au 20 avril au plus tard pour promulguer la loi (qui ne pourra entrer en vigueur qu’à partir du 1er septembre, comme le dispose le texte).

Les opposants à la réforme des retraites rappellent toutefois qu’« une loi, même votée, n’est pas forcément appliquée ». Et citent le « précédent » du Contrat première embauche (CPE) : en 2006, Jacques Chirac avait promulgué cette loi tout en suspendant son application. Elle avait finalement été abrogée quelques jours plus tard, face à l’opposition massive de la jeunesse dans la rue.

La censure partielle

C’est le scénario présenté comme le plus probable. Les Sages, qui doivent se pencher sur des recours déposés par l’opposition et le gouvernement lui-même, peuvent retoquer partiellement le texte. Les conséquences sont variables, selon la nature du rejet. Le Conseil constitutionnel peut considérer que certaines mesures – les « cavaliers sociaux », qui n’ont pas de lien avec la situation financière -, n’ont rien à faire dans un PLFSS rectificatif, ce qui les exclurait du texte.


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De même, si certaines dispositions sont censurées sur le fond, elles peuvent tout simplement être sorties du projet « dans la mesure où elles ne gênent pas l’application du reste » de la réforme, précise Guillaume Tusseau. C’est par exemple le cas de l’index senior. « Son rejet n’empêche pas la mise en œuvre de la réforme », poursuit le spécialiste. Libre au gouvernement, ensuite, de décider de l’intégrer dans une autre loi. Ou de l’oublier purement et simplement.

Une autre possibilité existe, mais elle est « rarement utilisée » : Emmanuel Macron pourrait décider de demander une nouvelle délibération au Parlement, en l’appelant à modifier les dispositions censurées.

La censure totale

C’est le scénario espéré par les opposants au texte. Et ce serait une première : sous la Ve République, jamais les Sages n’ont censuré entièrement une réforme des retraites. Cette possibilité n’est toutefois « pas à exclure », juge Guillaume Tusseau, en raison du « véhicule législatif » retenu par le gouvernement – le PLFSS rectificatif. « Un détournement de procédure », avait estimé le professeur émérite de droit public à Paris-I Panthéon Sorbonne, Dominique Rousseau, dans nos colonnes.

Si le Conseil constitutionnel décide de retoquer la loi pour ce motif, le gouvernement aura toujours la possibilité de « reprendre le même texte et tenter de le faire adopter par voie classique », indique Guillaume Tusseau. Si, en revanche, c’est le fond du texte qui est censuré dans son intégralité – ce qui a « peu de chances » de se produire –, « il faudra réécrire la loi ».

La question du RIP

Parallèlement aux recours sur le projet de loi, les Sages doivent se prononcer sur l’organisation d’un référendum d’initiative partagée. En cas de refus, aucun impact sur la réforme. S’il est validé, 4,8 millions de signatures doivent être récoltées au cours des neuf prochains mois. Ensuite, le Parlement dispose de 6 mois pour examiner le texte – à défaut, il est soumis à un référendum. Cela implique donc de long mois d’incertitudes.

Pour autant, cela n’empêche pas la promulgation de la réforme des retraites. Mais, d’un point de vue logistique, l’acceptation du RIP « risque de paralyser la mise en œuvre » de la loi. Car le texte, déposé par plus de 250 parlementaires, prévoit que l’âge de départ à la retraite ne dépasse pas les 62 ans.

« Il est compliqué de reculer l’âge pendant quelques mois et de revenir en arrière ensuite », commente Guillaume Tusseau. Par commodité, la mise en œuvre de la réforme pourrait donc être retardée même si, en cas de non-application d’une loi (dans le cas où elle est validée par les Sages), le Conseil d’État pourrait « être saisi et obliger le gouvernement à prendre les mesures qui s’imposent », conclut le spécialiste.

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