La huitième journée de manifestations depuis janvier contre la très contestée réforme des retraites, voulue par le président Emmanuel Macron, a connu une mobilisation sensiblement moindre en France mercredi 15 mars, à la veille de la soumission du texte au vote des deux assemblées. En parallèle, les parlementaires sont parvenus à un accord mercredi en commission mixte paritaire (CMP), sur une version commune du projet de réforme des retraites.
Le président français réunit dans la soirée sa Première ministre Elisabeth Borne et certains des principaux ministres concernés par la réforme. Car le gouvernement cherche « plus que jamais » à obtenir le soutien d’une « majorité naturelle » pour sa réforme des retraites, a indiqué mercredi le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran.
Mais il n’envisage pas « à ce stade » de la faire adopter sans vote, soit par un 49.3, a-t-on appris de sources concordantes dans le camp présidentiel, du nom de l’article de la constitution qui permet d’adopter un texte sans vote.
Députés et sénateurs ont trouvé un accord mercredi sur une version commune du projet contesté, avec la mesure la plus décriée, le report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite. Cela était indispensable pour un vote final, jeudi à l’Assemblée nationale.
Jeudi 16 mars, ce texte sera soumis au vote du Sénat, où la majorité de droite et centriste devrait sans surprise l’approuver, puis à l’Assemblée nationale, où le camp présidentiel ne dispose pas de la majorité absolue. Là, le vote est incertain : si le parti de droite Les Républicains dit vouloir adopter la réforme, de nombreux frondeurs dans ses rangs entretiennent le suspense.
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Plus de manifestants que samedi dernier
Depuis le 19 janvier, des millions de Français ont déjà manifesté pour dire leur refus de cette réforme. Le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans cristallise la colère, les opposants la jugeant « injuste », notamment pour les femmes et les salariés aux métiers pénibles.
Lors de cette huitième journée, un total de 480 000 personnes ont défilé mercredi en France, dont 37 000 à Paris, à l’appel des syndicats, selon un comptage du ministère de l’Intérieur. Selon le syndicat CGT, elles étaient plutôt 1,78 million en France, dont 450 000 à Paris.
Selon les chiffres de la préfecture, c’est davantage que lors de la dernière journée de mobilisation samedi 11 mars (300 000 manifestants, dont 48 000 à Paris), mais moins que la journée record du 7 mars, avec ses 700 000 manifestants.
La maire de Paris « ne donnera pas suite » à la demande de réquisitionner les éboueurs
En dehors des manifestations, les grèves reconductibles continuent dans plusieurs secteurs clés : transports, énergie, ramassage des déchets…
Sur la question des poubelles, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a rejeté sur la maire de Paris, Anne Hidalgo la « responsabilité politique » de trouver une issue à la grève des éboueurs, l’accusant d’« imposer » aux Parisiens l’accumulation des poubelles dans les rues de la capitale.
La maire PS a annoncé qu’elle « ne donnera pas suite » à la demande de la préfecture de police de réquisitionner les éboueurs de la ville pour limiter les effets de leur grève, au dixième jour, a-t-elle écrit dans un courrier transmis à l’AFP.
Car l’amoncellement des poubelles dans la capitale mondiale du tourisme s’est encore aggravée, avec plus de 7 600 tonnes de déchets encombrant les trottoirs, selon la mairie. Les éboueurs et agents de propreté de la Ville de Paris ont voté mardi soir la poursuite de la grève « au moins jusqu’au 20 mars ».
Coupure d’électricité au fort de Brégançon
Les secteurs de l’électricité et du gaz sont mobilisés. La direction d’EDF a fait état de 22,45% de grévistes à la mi-journée, contre 41,5% le 7 mars. Dans le Var, la fédération CGT Mines-Energie affirme avoir coupé le courant de 43 000 personnes dépendant d’un transformateur de la commune de Six-Fours, et « privé de courant des élus de la République », « voire résilié » leurs abonnements « dans leur permanence ou à leur domicile ».
Le fort de Brégançon, résidence officielle de la présidence de la République, a également été touché, selon la CFE-CGC Energie Côte d’Azur. Enedis a dénoncé auprès de l’AFP des « actes de malveillance » et précisé qu’elle portait « systématiquement » plainte.
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Les grévistes du syndicat CGT Énergie ont également menacé de faire baisser la pression dans les réseaux de gaz, sans quoi les grévistes s’en chargeront, ce qui pourrait priver de gaz des centrales et certains clients industriels. Les salariés de quatre terminaux méthaniers français et de 11 sites de stockage ont reconduit leur grève jusqu’au début de la semaine prochaine.
Plusieurs raffineries sont toujours en grève mercredi : « Dans celles de Donges, La Mède et Fos, le mouvement est reconduit avec arrêt des expéditions », a indiqué à l’AFP Eric Sellini, coordonnateur CGT pour le secteur.
À la SNCF, le trafic reste perturbé avec notamment trois TGV Inoui et Ouigo sur cinq, un Intercités sur trois, aucun train de nuit et deux TER sur cinq en moyenne nationale et des difficultés en Île-de-France. Le 7 mars, 80 % des TGV avaient été annulés. La RATP prévoit un trafic légèrement perturbé dans le métro parisien et très perturbé dans le RER, globalement meilleur que lors des premiers jours de grèves.
(Avec AFP)